Les années 1970 - Fin d'un monde et origine de notre modernité
Description
Introduction?>ES ANNÉES 1970, OBJET D'HISTOIRE ? On hésiterait même à poser la question, tant la période souffre d'un déficit global d'image : elle serait la décennie du mauvais goût »1, une «décennie perdue »2 qui « n'existe pas »3, une « pause » après des années 1960 « trop longues », une période « dépourvue de tout thème dominant ou de direction particulière »4, une « douche froide après l'excitation frénétique des années 1960 »5, des « années de doute »6... De fait, les premières idées qui viennent spontanément à l'esprit sont les chocs pétroliers, l'inflation, la montée du chômage, des grèves à répétition, les attentats perpétrés par des terroristes palestiniens, gauchistes, fascistes, irlandais, basques, corses ou encore bretons, des scandales politiques dans quasiment tous les pays industrialisés. Même sur le plan culturel, et notamment de la culture populaire, en termes de « goût » – mode, musique, arts visuels, architecture –, la décennie est loin de faire, c'est bien le moins que l'on puisse dire, l'unanimité. Ajoutons qu'en outre, elle a moins suscité l'attention des historiens que d'autres périodes. Ainsi, il n'existe pas pour les années 1970 d'équivalent à l'énorme somme d'Arthur Marwick sur les années 1960, paru il y a maintenant dix ans7. Ou, lorsque cette période a été abordée, elle s'est retrouvée englobée dans un ensemble plus vaste : How We Got There, de David Frum8, mordant et souvent irrésistiblement drôle, est un essai d'un commentateur politique américain brillant qui se sert de la décennie comme d'un point de départ pour arriver jusqu'à l'époque actuelle ; ou encore, l'ouvrage, très récent, de Jean-François Sirinelli sur « les vingt décisives » prend en compte les vingt années qui courent de 1965 à 19859.Alors ?Pourquoi proposer un travail d'historien sur « les années 1970 » ?Il faut, nous semble-t-il, lever dans un premier temps deux hypothèques, répondre à deux objections possibles.La première concerne la pertinence d'une approche chronologique centrée sur les décennies. L'Histoire peut-elle se découper en « tranches » bien ordonnées ? Non, bien sûr, si on en fait une règle, et un usage, systématiques. On soulignera toutefois que la question ne serait pas posée pour d'autres décennies : les années 1920, 1930, 1950 ou 1960 ont une cohérence thématique (respectivement la Prosperity ou les Années folles, la crise, la reconstruction ou les « miracles économiques », la contestation...) qui détermine leur historicité – inversement, les années 1940, écartelées entre la Seconde Guerre mondiale et l'après-guerre, en sont dépourvues. La seconde objection sera que la décennie 1970 est encore trop proche pour être abordée en historien, les archives ne sont pas toutes inventoriées, ne sont pas, ou mal, accessibles, du fait des divers délais de forclusion, le recul est trop faible, la sérénité impossible, la subjectivité inévitable, le risque de navigation à vue très réel, etc. Traiter d'une période aussi proche, ne serait-ce pas faire guère plus que du journalisme ? L'argument, inutile de le dire, est bien connu de tous ceux qui pratiquent, à quelque degré que ce soit, l'« histoire immédiate ». Il est suggestif de relever que c'est justement dans les années 1970, plus exactement en 1978-1980, que le CNRS a porté sur les fonts baptismaux un « Institut d'histoire du Temps présent » qui existe toujours aujourd'hui (Unité Propre de Recherche 301), lequel prit la relève du plus que trentenaire Comité d'histoire de la Seconde Guerre mondiale (créé en 1944). Encore sa zone de recherche débute-t-elle avec les années 1930... Dans les universités de province, l'histoire immédiate ne tient une place visible qu'à Toulouse 2, avec le GRHI (Groupe de recherche en histoire immédiate), désormais quasiment arrivé à l'âge de la majorité civile (même s'il est intégré dans une structure plus large). Que dire, qui n'ait pas déjà été avancé par d'autres, en faveur de l'histoire immédiate10 ? D'ailleurs, entre trente et quarante ans nous séparent de la période en question, qui n'est donc plus si « immédiate » que cela... Originellement un historien du XIXe siècle11, j'ai tenté ailleurs, en traitant du « mythe » de Diana, princesse de Galles 12 , de mettre en évidence la façon dont la connaissance du passé permettait d'éclairer le (quasi-) présent, et d'utiliser les méthodes de l'historien pour faire le tri, établir des hiérarchies, proposer des perspectives, dans les informations que médias, acteurs ou simples témoins des événements nous apportent, certes de plus en plus surabondamment aujourd'hui. En outre, il est illusoire de penser que plus une période est éloignée de nous, plus son histoire est établie de façon définitive et intangible. Chaque génération reconstruit ses objets d'histoire, et va soumettre le passé à des interrogations nouvelles. Je n'ai donc voulu proposer ici qu'un ouvrage qui, en l'état actuel de la documentation, vise à ouvrir des pistes, suggérer des réflexions, signaler les potentialités de recherche, sans m'illusionner un seul instant sur le caractère définitif des conclusions auquel il pourra arriver.
Détails
Auteur: Philippe Chassaigne
Editeur: Armand Colin
Collection: Nathan Université
Presentation: Broché
Date de parution: 14 Mai 2008
Nombre de pages: 368
Dimensions: 16 x 24 x 3,0
Prix publique: 43,00 €
Information complémentaires
Numéro de série: 1970
Classification: Histoire > Histoire générale et thématique
Code Classification: 3377 > 3378
EAN-13: 9782200266936
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